La fée mariée, partie 2: travail du textile et rendu final

Bonjour à tous et toutes!
Dans la première partie de cet article j'ai voulu vous expliquer le processus créatif du dessin à la toile pour une robe de mariée. Après cette toile, nous sommes allés chercher les tissus définitifs pour la robe finale. Nous sommes allées au marché Saint Pierre à Paris, car pour un tel projet, je ne me voyais pas commander en ligne des tissus que je n'aurais pas pu manipuler. Les tissus sont: pour la base: un coton pour la doublure, un crêpe en viscose acétate pour la jupe et le bustier et pour la sur-robe, une mousseline de soie et de la dentelle à poser en appliqué.
Pour le bustier, il "suffisait" de refaire ce qu'on avait fait une fois avec la toile. SAUF QUE (parce qu'il y a toujours un "sauf que") les tissus que j'ai choisi pour ce fameux bustier n'étaient pas assez rigides pour poser les baleines et avoir une belle structure. J'ai dû avoir recours à "l'appel à un ami", plus précisément à mon amie modéliste, qui a très gentillement pris le temps de m'expliquer point par point comment coudre les tissus choisis en fonction de mon projet. Sans mentir, j'ai deux pages complètes de notes sur notre conversation téléphonique et j'ai suivi le plus religieusement du monde ses conseils...Et je ne l'ai jamais regretté! En premier lieu, j'ai dû intercaler une épaisseur de toile à corset dans le bustier, pour la structure. Et pour avoir un beau rendu avec mon crêpe, j'ai fais un aplat. Qu'est-ce qu'un aplat? Je n'en avais aucune idée avant ce projet. J'ai "lier" mes deux tissus (crêpe et toile à corset) par une série de point de couture à la main, ainsi je pouvais considérer ces deux épaisseurs comme un seul tissu pour la suite du projet. Qui dit "point à la main" dit malheureusement "aller plus lentement" et cette phase d'aplat m'a bien pris une semaine (à raison de deux heures par jour).
Ce temps de couture à la main m'a permis une certaine réflexion sur moi-même. J'ai identifié au moins deux stratagèmes que mon cerveau, cette patate, met en place pour retarder les difficultés d'un projet. La première est la célèbre technique de l'autruche, autrement dit "Si je repousse la difficulté, elle va peut être disparaitre?" (évidemment c'est inefficace sur le long terme). La seconde est la technique de la diversion ou le "oh tiens et si je faisais des trucs que je trouve chiant d'habitude pour justifier que je ne m'attaque pas à cette difficulté?", également inefficace à long terme. Je ne pensais pas écrire ça un jour mais j'ai dû repousser une furieuse envie de ranger ma maison pour me concentrer sur ma tâche. Me faut-il donc des projets complexes pour devenir une vraie fée du logis?
Si vous suivez bien, j'ai un tissu crêpe qui me sert à faire le bustier (avec son joli rendu mate légèrement texturé) et la jupe (grâce à sa fluidité) . Mais ce n'était pas la simple jupe rectangle froncée à la taille et coupée dans le droit fil (trop simple!)...Mon amie m'a suggéré de couper mon tissu dans le biais pour un plus beau rendu final. Et qui dit couper dans le biais dit tissu qui se déforme sans arrêt pendant la coupe, un vrai plaisir donc. La solution? Finalement c'est souvent la même chose: ralentir, prendre son temps pour couper. D'ailleurs j'ai aussi vu comme technique qu'il vallait mieux couper le crêpe par de petits coups de ciseaux avec peu d'amplitude de mouvement. Ca évite que le tissu bouge plus que de raison. Par contre niveau rendu, ça en valait la peine. Et ça tombe bien, dans mon cahier des charges il y avait le point (jupe qui tourne).
Pour moi le plus grand stress résidait dans la gestion de la mousseline de soie. La mousseline de soie est un tissu que je qualifierai sans hésiter de traître. Il est difficile à travailler, compliqué à découper. Ce tissu demande beaucoup de temps, de patience et de minutie. A ce moment du projet ma patience commençait un peu à s'essouffler mais la mousseline m'a mis un petit coup de fouet. C'était très intéressant de découvrir ce type de tissu et les astuces pour le travailler. J'ai eu recours à beaucoup (vraiment beaucoup) de papier de soie, qui m'a permis de le couper mais également de le coudre. Le papier de soie permet d'éviter que le tissu ne se prenne dans les dents de la machine à coudre et permet au ciseau d'avoir un guide un peu plus ferme pour couper des formes. J'ai donc recopier toutes les parties de patron autant de fois qu'il le fallait sur du papier de soie que j'ai glissé sous mon tissu. Ensuite avec mes ciseaux je suis venue couper le tissu en même temps que le papier de soie. Evidemment qui dit tissu très fin dit "pas d'épinglage possible" et comme je n'ai pas de poids de couture chez moi, j'ai utilisé tous les petits jouets de mes enfants pour bloquer le tissu pendant la coupe!
Rétrospectivement je garde un super souvenir de cette étape, la mousseline de soie est un tissu magnifique, très fluide, qui a un tombé extraordinaire. L'utiliser a été très stressant et pénible mais infiniment intéressant et je pense avoir appris beaucoup en tant que couturière grâce à cette matière.
La dernière étape consistait à poser de la dentelle en appliqué sur la mousseline. Pour ça j'ai commencé par épingler la dentelle sur la mousseline directement sur la mariée! Un dernier essayage, qui a bien duré 2 heures, une semaine avant le mariage, à 21h, alors que personne n'avait mangé...On était sur un niveau de chaos assez phénoménal. J'ai profité de ce temps pour: faire essayer la robe à ma mariée, régler les ourlets et poser toute la dentelle.
Pour cette dernière étape, il me restait pile poil une semaine... "oh ça va quelle maitrise!" me suis-je dit. Grave erreur. La pose de dentelle à la main est un travail très long et minutieux. A deux jours du mariage, j'étais désespérée (et très stressée)...Maintenant que j'y pense j'étais aussi complètement enruhmée, j'avais même perdue ma voix. Mon mari était parti faire l'enterrement de vie de garçon du futur marié et j'avoue n'avoir pas pris correctement en compte la gestion des enfants en plus de la robe pendant tout un weekend dans mon organisation de travail. J'ai finalement décidé de tenter le tout pour le tout et de fixer la dentelle restante (et il y en avait pas mal encore) à la machine à coudre. Je n'étais pas sereine, j'ai fais plusieurs tests sur des chutes de mousseline pour gérer au mieux la tension du fil et je me suis lancée! Ce soir-là, j'ai cousu en deux grosses heures ce que j'avais cousus en cinq heures (à vu de nez) à la main. Alors bien sûr, la finition est moins fine, mais au moins la dentelle était là!
Si je devais résumer cette création, ce qui me saute aux yeux c'est qu'elle m'a énormément appris. Déjà en terme de techniques pures, avec l'utilisation du papier de soie, la coupe dans le biais, la pose d'élastique et la gestion de la tension machine, j'ai fais d'énormes progrès. Ne serait-ce que sur l'utilisation de toile pour valider les formes d'un vêtement, c'est une étape que je sautais volontiers avant mais que je prend désormais bien plus souvent le temps de faire. Pour ce qui est de la minutie également, j'ai gagné en précision et j'ai appris à prendre le temps nécessaire, même dans le stress de l'action! Plus largement, je suis assez fière de la gestion de mon temps, j'ai plutôt bien gérer mon organisation en accordant un temps plutôt juste à chaque étape. Je regarde retrospectivement ce projet avec toujours autant d'étoiles dans les yeux. Je me dis et me dirai parfois avec un brin d'émerveillement et une pointe de nostalgie que quelqu'un à un jour eu suffisamment confiance en moi pour me confier un projet aussi important! Je suis très heureuse d'avoir eu cette place là dans le mariage de ma jolie mariée, que la présence de cette robe chez elle puisse lui rappeler en toute occasion que je suis son amie (comme dans la chanson de toy story!).
J'ose espérer que ce petit pavé vous aura intéressé, moi j'ai pris plaisir à l'écrire en tout cas (et à revoir certaines photos!). Prenez soin de vous et à la prochaine!

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